Réflexion infirmière : Prise en charge de la santé humaine et la santé de la Terre
Vous êtes un être humain qui se présentez au triage de l’urgence avec des signes évidents d’infection, dont une température corporelle à 38,5◦ C, soit 1,5 degré de plus que la normale. Vous avez des frissons, des courbatures et peu d’énergie. Votre fréquence cardiaque est élevée. Tout porte à croire qu’il y a une instabilité homéostatique et ce changement a des conséquences sur votre bien-être et votre santé. Selon l’Échelle canadienne de triage et de gravité (ÉTG), votre état est considéré comme « urgent », ce qui signifie qu’une infirmière vous réévaluera toutes les 30 minutes afin de limiter les risques de préjudice pour votre santé. Vous quittez finalement l’urgence avec la prescription suivante : antipyrétique, repos, hydratation et revenir consulter si votre état se dégrade.
Réfléchissons maintenant à la situation suivante. La Terre s’est réchauffée de 1,2◦ C, elle a des sueurs froides, des sueurs chaudes, elle est fatiguée et a peu d’énergie. Elle peine à maintenir son homéostasie. La Terre ne sait pas à quel triage se présenter. Elle voudrait bien se reposer, refaire le plein d’énergie, mais ses ressources sont continuellement exploitées par l’être humain. Des biologistes, des scientifiques ont sonné l’alarme il y a plusieurs années : il y a urgence climatique. Des prescriptions sous forme de cibles à atteindre ont été remises aux décideurs afin d’éviter une hausse de température et protéger l’intégrité des systèmes écologiques dont les êtres humains dépendent.
Non-adhésion au traitement.
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La science infirmière a un intérêt pour les processus de la vie, du bien-être et du fonctionnement optimal des êtres humains, sains et malades; un intérêt envers des interactions entre la personne et l’environnement dans des situations normales et critiques de la vie humaine; et un intérêt sur les processus qui entraînent des changements positifs de la santé[1].
Il est reconnu que les changements climatiques ont des conséquences sans précédent sur la santé des collectivités et des individus. Au quotidien, les infirmières constatent que les canicules et les îlots de chaleur exacerbent les maladies chroniques, dont les problèmes cardiorespiratoires. Or, trop peu d’études infirmières s’intéressent à la santé de l’être humain dans son rapport unique aux autres êtres vivants.
En considérant le lien intrinsèque entre l’être humain et les systèmes écologiques de la Terre, de nouveaux savoirs infirmiers pourraient être produits pour influencer l’adhésion des décideurs aux traitements prescrits.
La crise de la biodiversité et les changements climatiques doivent être abordés de la même manière que celle de l’être humain qui se présente à l’urgence.
Marie-Hélène Blais
Étudiante au doctorat en sciences infirmières de l’Université Laval